DiscoverIci l'EuropeP. Moscovici : "L'UE doit aller jusqu'au bout dans sa volonté d'utiliser les avoirs russes gelés"
P. Moscovici : "L'UE doit aller jusqu'au bout dans sa volonté d'utiliser les avoirs russes gelés"

P. Moscovici : "L'UE doit aller jusqu'au bout dans sa volonté d'utiliser les avoirs russes gelés"

Update: 2025-12-05
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Cette semaine, nous accueillons Pierre Moscovici, qui quitte la présidence de la Cour des comptes française pour rejoindre la Cour des comptes européenne. Cet ancien député et commissaire européen tire la sonnette d’alarme sur l’état des finances de la France et appelle l’Union européenne (UE) à être unie face au plan de paix des États-Unis pour l’Ukraine.

La dette française s’élève à un niveau record de 115,6 %, la troisième la plus haute des Vingt-Sept, derrière la Grèce et l'Italie. Son déficit représente 5,4 % de son PIB, faisant de la France l’un des plus mauvais élèves de l’Union européenne. Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes en France et ancien ministre, rappelle que la France "n'est pas n'importe quel pays, ni dans le monde, ni dans l'UE. Elle a un rôle moteur dans la construction européenne".

Bien que le pays soit la deuxième plus importante économie de l’Union, il reconnaît ses difficultés budgétaires : "Si la France n'est pas capable de balayer devant sa porte, sa crédibilité est atteinte. [...] La dynamique de notre dette est mauvaise. Nous sommes les seuls dont la dette croît autant. Notre déficit est le plus élevé de la zone euro".

Pierre Moscovici, également ancien député et commissaire européen, évoque les difficultés budgétaires passées de la Belgique, l'Espagne, le Portugal ou la Grèce : "À l’époque où j’étais commissaire, penser que nous aurions des taux d'intérêt plus élevés que ces pays était inimaginable. [...] En se retrouvant dans cette situation, nous ne pouvons pas faire face aux défis du futur que sont le financement de la transition écologique, de la transition numérique, que sont l'effort de défense ou le renforcement de notre capacité d'innovation et de recherche. [...] La France s'affaiblit et a un nœud coulant autour du cou, qui, petit à petit, la rend impuissante et l'empêche d'agir pour le bien de ses citoyens".

"C'est aux États de réduire leur dette"

Alors que la France est en plein vote de son budget pour l’année 2026, Pierre Moscovici met en garde : "Si nous voulons rester sur une trajectoire qui nous amène à moins de 3 % de déficit en 2029, et c'est fondamental pour inverser le cours de la dette, il faut que le budget voté nous emmène sous les 5 % de déficit".

Au niveau européen, la moyenne de la dette s’élève à 81,9 %. Les dettes sont à des niveaux très disparates entre les États membres. "La plupart des pays de la zone euro ont quand même fait un effort pour réduire leur dette après la crise du Covid", sauf la France repartie à la hausse, souligne-t-il. "Entre le Danemark et le Luxembourg qui sont autour de 25 % de dette, la Grèce à 150 %, et nous à 115 %, l'Union est toujours faite d’États et ce sont les États qui, à des degrés divers, doivent réduire leurs dettes", poursuit-il pour expliquer ces disparités.

"Ne la condamnons pas avant de savoir"

Federica Mogherini, ancienne cheffe de la diplomatie européenne, a été inculpée dans une enquête concernant l'attribution par l'Union européenne d'un contrat de formation de fonctionnaires européens, au Collège d'Europe, en 2022. Elle est soupçonnée d’avoir été avertie, à l'avance, des critères de sélection à remplir pour décrocher un futur appel d’offre. Alors que l’enquête est toujours en cours, l'ancien commissaire réagit à l’affaire : "J'aime beaucoup Federica Mogherini. C'est une amie. [...] Nous verrons ce que révèle l'affaire. Son comportement, à savoir démissionner dès lors qu’il y a suspicion, va dans la sens de l’exemplarité. Ne la condamnons pas avant de savoir".

"La paix ne peut pas se faire aux conditions de Vladimir Poutine"

Les États-Unis tentent de négocier un plan de paix entre l’Ukraine et la Russie et semblent peu se préoccuper de l’avis des Européens. "Nous ne pouvons pas avoir des négociations purement russo-américaines et traiter du sort des Ukrainiens sans eux et sans leur président légitime, monsieur Zelensky. [...] Nous ne pouvons pas non plus discuter de l'avenir de l'Ukraine sans les Européens, parce qu'elle est sur notre continent et que les garanties de sécurité, le moment venu, doivent être européennes. La paix doit préserver les intérêts des Ukrainiens et ne peut pas être une paix aux conditions de Vladimir Poutine".

La Commission européenne a présenté cette semaine un plan pour financer l’Ukraine sur deux ans. Pour ce faire, l’une des options retenues est d’avoir recours aux avoirs russes gelés en Europe, dont l’immense majorité est immobilisée en Belgique. Par peur de représailles russes, les Belges s’opposent pour le moment à cette option. S’il explique ne pas avoir un éclairage complet sur la légalité de la réquisition de ces avoirs, il n’est pas contre l’idée proposée par la Commission : "Il me paraîtrait bon que la volonté exprimée d'utiliser ses avoirs russes gelés aille jusqu'au bout pour financer ce que nous devons à l'Ukraine. Il faut naturellement limiter les risques. Il faut offrir des garanties aux États membres".

"Pour être entendu, il faut être soi-même volontaire"

Il appelle les Vingt-Sept à "aller de l’avant" au sujet de ces avoirs russes : "Si nous sommes trop timides, trop repliés sur nos intérêts nationaux et pas suffisamment actifs, alors il ne faut pas s'étonner d'être une étape qu'on rate. Pour être entendu, il faut être soi-même volontaire".

L'autre option envisagée par la Commission pour financer ce prêt est le recours à un emprunt européen, mais cela nécessite l’accord à l'unanimité des États membres. Certains d’entre eux, comme la Hongrie, s’opposent à cette proposition. Un système de vote à l’unanimité remis en question par l’ancien ministre français des Affaires européennes : "Il faut avancer. Le problème de l'Europe, c'est ce consensus que nous devons chercher. J'ai toujours respecté tous les États membres. Il faut les traiter comme tous égaux mais il ne faut pas non plus accepter cette logique du véto. Il faut aller vers davantage et même la totalité des décisions qui soient prises au vote à la majorité qualifiée".

Il dénonce le fait que certains dirigeants comme le Premier ministre hongrois Viktor Orban ou le Slovaque Robert Fico "ont parfois de la sympathie pour Vladimir Poutine". Selon lui, l’Europe doit pouvoir "avancer" sans eux. "Si le spectacle que nous offrons au monde, alors que nous sommes sur notre territoire et que cette guerre est européenne, est celui de l'impuissance, de la division et de la paralysie, alors ne nous étonnons pas que les décisions soient prises sans nous", conclut-il. 

 

Emission préparée par Agnès Le Cossec, Oihana Almandoz, Perrine Desplats et Isabelle Romero

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FRANCE 24